Published On : 3 April 2020 |Last Updated : 3 April 2020 |455 words|2 min read|4 Comments on Je ne produirai pas d’art de confinement|

La grande mode, en ce moment, chez les artistes, est aux projets créatifs spéciaux « confinement » : créer à partir de ce qu’on a sous la main, photographier sa fenêtre, etc.. Pour un photographe de rue, ça n’a pas de sens. Pour un portraitiste, ça n’a pas de sens. Pour n’importe quel artiste, en fait, ça n’a pas de sens.

Je me reconnais particulièrement dans l’approche d’Alexandre Tharaud, pianiste professionnel qui n’a pas de piano chez lui, et qui travaille chez des amis. Le travail, c’est dedans, mais l’inspiration, c’est dehors.

J’ai déjà expliqué pourquoi le confinement prolongé, d’un point de vue scientifique, risque de produire plus de dépressifs donc de suicidés que la mortalité naturelle du COVID-19. Ledit confinement ne vise pas à protéger les personnes de la maladie et de la mort (de toute façon, l’épidémie ne sera stoppée que lorsqu’au moins 60-80 % de la population — restante — aura développé des anticorps), mais à protéger le système de santé (qu’on sait sous-dimensionné donc fragile) d’un engorgement.

Pour les médecins et pour le gouvernement, la victoire c’est minimiser les morts (visibles) du COVID-19 ; les femmes battues et les pendus au lustre (invisibles) ne rentrent pas plus dans leurs statistiques que les malades asymptomatiques. Tant qu’on a un respirateur pour chaque vieux en réanimation, vous pouvez étouffer à domicile, prendre votre santé mentale, la rouler et vous l’enfoncer bien profond : tout le monde s’en carre.

D’un point de vue artistique, l’enfermement et la privation de liberté sont la mort de toute chose. C’est le deuil de l’art. C’est la fin des haricots. Prétendre le contraire et essayer de le prouver relève d’un syndrome de Stockholm. Le foyer est une prison. L’enfermement est une folie. La solitude est un poison. Ça m’inspire autant à créer qu’essuyer mon cul après avoir chié.

Non, je ne vais pas faire semblant d’être heureux. Si je devais faire des photos candides de mon quotidien, en ce moment, ça serait mon caca, une pile de vaisselle sale qu’il faut inlassablement relaver, une pile d’emails que j’ai la flemme d’ouvrir, et toutes les bouteilles de bière vides que je siffle pour maintenir une alcoolémie constante qui me permet de tolérer 4 murs.

Pour couronner le tout, cette semaine, j’ai reçu la newsletter du magazine Wipplay :

Ça m’a achevé. Je ne peux vraiment plus piffer ces pseudos magazines où l’entre-soi photographique parisien dégouline sur internet, par des bourgeois pour des bourgeois, nombrilicentrés et vautrés dans leurs privilèges. Mais le plus grave, c’est qu’ils ne doivent même pas se rendre compte.

Je devrais peut-être faire des photos pour leur montrer…

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